Chronique de guerre #2 : Papy fait de la Résistance**
Votre série de l'été, Chronique de guerre, vous permet de partir à la rencontre de personnes ayant participer à un conflit ou à un évènement historique. Témoignages authentiques d'une époque révolue, chaque témoignage a été le fruit d'un riche travail personnel et historique, demandant de la part de la personne interrogée, un travail rétrospectif sur cet évènement précis de sa vie, souvent très lointain.
Vous avez été témoin ou acteur d'un fait historique ? Pour en parler, vous pouvez me contacter par mail à l'adresse suivante laurinevarnier8@gmail.com.
Maurice WOLKOWITSCH a fêté sa centième bougie en septembre dernier, mais il a encore en mémoire tous ses souvenirs de jeunesse. Derrière son métier d’universitaire en Géographie se cache une vie mouvementée durant la Seconde Guerre Mondiale. Membre d’une famille de résistants, il a dû passer une partie du conflit caché dans une ferme à Fougerolles, à un kilomètre de la maison familiale, surveillée de près par l’Occupant. En présence de son fils, il a accepté de témoigner
« Je suis né en 1920 à Versailles et je passais mes vacances dans le Berry, à Fougerolles. Enfant et adolescent, j’ai été plutôt mauvais élève, mais j’ai passé un Bac scientifique, puis j’ai poursuivi des études d’Histoire et Géographie jusqu’à l’agrégation. La guerre est passée par là. Plusieurs membres de ma famille ont rejoint la Résistance dont mon frère aîné qui a été arrêté puis fusillé. Ensuite, étant moi-même recherché, j’ai dû fuir la ville pour notre maison de campagne à Fougerolles. Bien sûr, pour ne pas être repéré, j’ai dû trouver une autre maison où loger. Grâce à la bienveillance des habitants du village, j’ai vécu de 1943 jusqu’à la fin de la guerre dans une ferme. Pendant ces deux années, j’ai laissé toute ma vie derrière moi, y compris mon nom, je suis devenu Philippe AUFRERE.
L’entrée en Résistance
« C’est tout naturellement que j’ai rejoint la Résistance locale. Nous faisions partie de l’Armée Secrète créée par Jean Moulin à la demande du Général de Gaulle. Nous formions le maquis du coin, composé essentiellement de jeunes agriculteurs. Notre vie était tout à fait ordinaire le jour, nous travaillions dans les champs, et certaines nuits, dans l’ombre des forêts, nous recevions des parachutages d’armes et de militaires américains. Tout le village savait que nous faisions partie du maquis, mais personne ne nous a dénoncés. Je faisais passer des messages oraux car un résistant prudent ne devait rien garder comme papier sur son activité. En effet, le moindre écrit sur nos activités pouvait être compromettant. Tout dans la tête, rien dans les poches ».
Vers la victoire
« Le débarquement du 6 juin 1944 a été un grand bouleversement dans la Résistance française. Notre organisation était maintenant militaire. De nouvelles missions nocturnes nous incombaient. Je me souviens notamment que nous avions fait sauter un train entre la Châtre et Argenton. Notre maison familiale, l’Abbaye de Varennes, a pu être conservée grâce au notaire qui a tout fait pour qu’elle ne puisse pas être vendue, au point d’enterrer dans son jardin l’acte de propriété pour être sûr qu’on ne le trouve pas. En 1945, j’ai pu rentrer à Paris et retrouver mes parents. Ce fut aussi la découverte de toutes les horreurs dissimulées pendant la « drôle de guerre ». J’ai repris mes études de lettres et je me suis marié. L’enfant qui n’aimait pas l’école est devenu professeur d’Université. Ce n’est vraiment qu’après le BAC que je me suis mis à travailler ».
Aujourd’hui Maurice Wolkowitsch est confiné à Paris avec son fils Gilles. Il continue de se lever à cinq heures du matin tous les jours. Après sa retraite, il a continué d’écrire des livres jusqu’à l’âge de quatre-vingt cinq ans avant de perdre la vue. Mais que fait-il de ses journées ? Il pense à la jeunesse, écoute la radio et se passionne pour l’actualité. Une vie de centenaire confiné.
Laurine Varnier, 18 ans, Le Blanc France.